Des arômes fruités, de noix, de fruits confits, le cidre de glace tapisse nos palais avec élégance
Quand tout commence au Québec… C’est en 1990 que, s’inspirant des vins de glace, un viticulteur de Dunham invente la recette du cidre de glace, capitalisant alors sur les deux éléments propres au terroir québécois : les pommes et le froid. Protégé depuis décembre 2014 via une Indication Géographique Protégée (IGP), le vin de glace a depuis navigué dans l’Ouest canadien, passant la frontière nord des États-Unis avant d’arriver en Europe. Notamment dans l’Ouest de la France ! La preuve du côté de Guenrouët (44) où s’illustre Laurent Guillet, des établissements du même nom (Cidres Kerisac).
Le cidre de glace est né au Québec où le climat unique de la région a inspiré son élaboration, alors est-il facile d’en faire sur le territoire français ? Qu’est-ce qui vous en a donné l’envie ?
Laurent Guillet : C’est mon ancien patron qui, dans la foulée d’un voyage au Québec il y a 10 à 12 ans, trouve que c’est une idée formidable en termes de valorisation de la pomme, une matière première que nous autres cidriers connaissons bien. Il nous a donc semblé très opportun de nous pencher à notre tour, producteurs comme coopérateurs, sur ce produit différent. Innovant qui plus est, puisque non encore distribué à l’époque et ainsi à même de renvoyer au marché une nouvelle image. Tout cela avait du sens, historiquement, les Québécois utilisaient davantage la pomme de table là où nous travaillons principalement la pomme cidricole.
Cela dit, le process québécois à son origine utilise le froid naturel. Les variétés de pommes une fois récoltées sont mises dans des palox le long du Saint-Laurent, les températures négatives pendant plusieurs semaines vont alors déshydrater la pomme naturellement et concentrer le sucre. Le froid intense est ici primordial : la question fut donc pour nous de relever le défi.
Le cidre de glace peut être élaboré à partir de deux procédés de concentration des sucres de la pomme par le froid : la cryoconcentration et la cryoextraction. Comment procédez-vous ?
Laurent Guillet : Nous avons opté pour la cryoconcentration en vue justement de contourner le froid naturel – même si les Québécois eux-mêmes ont modifié leur procédé pour accélérer les choses – et ceci via le froid contrôlé en frigos.
Alors comment procédons-nous ? Une fois la récolte de nos pommes démarrée mi-septembre, on presse et on obtient des moûts (liquide sucré non fermenté) de différentes typicités en fonction des variétés. Ils sont acidulés, très doux ou un peu amers et c’est l’assemblage de ces différents moûts qui nous permet de trouver le bon équilibre. Tout est une question de dosage et ce travail complexe est le fruit de trois années de recherches.
Nous stockons la recette obtenue dans des cuveaux de 1000 l et les mettons au congélateur. Ils seront mis ensuite à fondre dans un hangar de stockage à température ambiante. La partie solide se sépare alors de la partie liquide. Suite à ces étapes, on obtient une mélasse que nous allons mettre plusieurs semaines a plusieurs mois en fermentation lente afin d’obtenir le produit définitif. Depuis 8 ans, je peux dire qu’on a trouvé le bon assemblage.
Avec quoi le recommandez-vous ?
Laurent Guillet : Le cidre de glace reste avant tout un liquoreux de pommes. Partout où l’on veut proposer un vin de Loire liquoreux, le cidre de glace à toute sa place !
Il se boit en petite quantités bien frais, tapissant le palais avec des arômes fruités, de noix et de fruits confits. Il accompagne très bien le foie gras et se révèle très étonnant avec un camembert ! En dessert, il s’alliera parfaitement avec une tarte Tatin accompagnée de sa boule de glace.
C’est vraiment un produit très festif !
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À savoir : Chez Kerisac, sa teneur en alcool est de 9° sans chaptalisation, ce qui signifie qu’on ne rajoute pas de sucre. Comme pour les cidres français, c’est uniquement la concentration du sucre dans la pomme qui donne le produit fini. Un paramètre très important dans la reconnaissance de notre savoir-faire.